Développer des outils pédagogiques numériques : expérimentations avec Camille Puyaumont en stage au Cerfav

Camille Puyaumont est venue au Cerfav pour réaliser son stage de diplôme supérieur d’arts appliqués et de design qu’elle effectue au lycée Jean Monnet à Yzeure. Accompagnée par David Arnaud, chargé de projet numérique, elle a expérimenté les outils numériques déployés dans notre centre en profondeur. Grâce à un dispositif permettant le recueil des données et l’analyse de leur impact, Camille a co-construit avec David, une expérience aux dimensions créatives et pédagogiques. Elle nous explique tout dans son interview.

Camille, peux-tu nous rappeler dans quel contexte tu es venue effectuer un stage au Cerfav ?

Je suis en DSAA (Diplôme supérieur d’arts appliqués et de Design) mention produit, en deuxième année, au lycée Jean Monnet à Yzeure. Il faut effectuer un stage de trois mois pour valider cette formation, et j’ai choisi de revenir au Cerfav !

Je suis dans la continuité de mon projet Liberté, que j’avais réalisé ici lors de mon apprentissage (en 2024). Le but est de continuer à travailler avec l’outil de modélisation 3D et le verre.

J’ai été stagiaire auprès de David Arnaud, qui, à travers le programme [G]host, a donné ce contour pédagogique à la captation des mouvements, pour les transmettre. Ces questions m’intéressent beaucoup, je suis passionnée par la pédagogie. Ces nouveaux outils sont très intéressants à étudier.

Quelles ont été tes missions concrètes ?

J’ai utilisé un outil de modélisation 3D en réalité virtuelle et participé à des séances de motion capture. David et moi avons élaborer des séances d’explicitations : je me suis remémoré les détails de mes souvenirs de création en verre en soufflage. Cela faisait plus d’un an que je n’avais pas soufflé, donc au début j’ai trouvé cela approximatif. David m’a guidée, et j’ai réussi à utiliser un vocabulaire assez précis pour expliquer ce que je ressentais, comment je créais.

À partir de ces explicitations, je me suis rappelé d’énormément de souvenirs, puis j’ai créé à partir de l’outil de modélisation 3D immersif. Les objets façonnés représentaient en quelque sorte mes souvenirs de soufflage.

Par exemple, j’ai réalisé une explicitation sur le geste du tranchage, j’ai essayé ensuite de le refaire pour une pièce créative via la modélisation 3D. Évidemment ce n’est pas le même outil, pas la même matière, et je n’ai pas réussi à reproduire exactement le geste.

C’est à ce moment-là qu’est venue l’envie d’aller en atelier pour pouvoir reproduire les pratiques en VR. Il y a une sorte de triangulaire entre la modélisation 3D, le parler (l’explicitation), l’atelier. On essaie de voir quels liens se tissent entre ces éléments.

Modelage en réalité virtuelle - capture d'écran
Modelage en réalité virtuelle – capture d’écran
Modelage en réalité virtuelle - capture d'écran

Tu as reproduit les gestes variés au cours de la phase de modelage immersif ?

Oui, j’ai conçu d’abord des pièces artistiques. L’objectif était d’utiliser l’outil comme tel pour créer. Au bout de trois semaines, j’ai réussi à me détacher de ma volonté de juste expérimenter et j’ai commencé à me dire : ok, là je connais mieux l’outil, je peux réussir à faire des objets utilitaires.

J’ai conçu des verres et j’y ai fait de la « gravure », avec cette minutie que j’aurais pu avoir dans la réalité.

Pour l’instant, vous êtes encore dans une phase de réflexion, et de récolte de données.

Effectivement, pour le moment il s’agit d’une étape expérimentale. C’est David qui exploitera les données qu’on a recueillies.

Modelage en VR et motion capture
Modelage en VR et motion capture
Explicitation de la séance de motion capture
Explicitation de la séance de motion capture

Quel est ton ressenti global sur cette expérimentation ?

C’était génial, parce que je me suis vraiment plongée dans un univers que je ne connaissais pas. J’ai une formation de design de produit tournée vers l’artisanat. Jusqu’à maintenant, toutes mes expériences ont été faite dans l’artisanat parce que j’étais attiré par le domaine. 

Il y a toujours eu une dimension pédagogique, c’est un sujet qui me suit, mais c’est la première fois que je suis confronté aux nouvelles technologies – cela donne envie de créer une nouvelle pédagogie, c’est un cadre vraiment intéressant donné par le Cerfav.

J’ai d’abord découvert ce qu’était l’explicitation, la motion capture, je n’avais jamais vu comment ça fonctionnait vraiment. J’ai pris en main et progressé dans mon utilisation de l’outil de modélisation. Ça ouvre tellement de possibilités sur ce qui est envisageable de faire dans sa gestuelle. Pour la création artistique, autant que pour la sauvegarde des gestes.

J’ai aussi eu la chance de pouvoir souffler du verre pendant 4 jours, et devenir encore plus précise, pointilleuse, dans mes explicitations. 

Séance de pratique dans l’atelier de soufflage à la canne
Séance de pratique dans l’atelier de soufflage à la canne

Ces expériences t’ont-elles permis d’élargir ton champ de création, de mieux comprendre comment tu utilises le verre et comment tu le crée ? De pouvoir mieux expliquer et devenir pédagogue dans ta pratique ?

J’arrive mieux à comprendre pourquoi je fais ces gestes-là, comment je les fais. Dans les souvenirs dont je me suis rappelé en soufflage, je me suis rendue compte que j’avais gardé une certaine idée du geste qui dans le réel ne s’est pas reproduite. Et ensuite, quand je suis repassé à la VR, j’ai pu faire le lien et me dire que c’était réalisable aussi dans la matière réelle.

Sur le plan de la pédagogie, ma volonté est de devenir enseignante. C’est vrai que l’explicitation permet de poser les détails et maintenant, je fais plus attention quand j’explique quelque chose, de porter attention à ces détails au maximum.

Ça permet à l’autre de pouvoir comprendre, et d’en tirer une pratique créative.

Après ta première expérience lors de ton apprentissage au Cerfav, tu as l’impression d’avoir fait un bon en avant dans la prise en main des outils numériques ? Pour ton projet Liberté, tu en avais fait une utilisation très instinctive. C’est différent cette fois ?

La première fois, je rentrais de voyage, et je voulais continuer à le vivre un peu, donc effectivement c’était très instinctif. Je ne connaissais pas l’outil et j’avais compris que je pouvais reproduire le décor que j’avais vu en Mongolie. J’avais conscience que je pouvais aussi apporter beaucoup de détails.

J’étais partie sur quelque chose de très abstrait avec ce projet Liberté, et aujourd’hui, je suis arrivé à créer des verres à pied gravés, mais je suis passé par des formes abstraites pour y arriver. Ça m’a permis de tester les réactions de la matière virtuelle.

Penses-tu que ces outils te seront utiles dans ton avenir professionnel, en tant qu’enseignante ?

Oui, je pense qu’ils seront utiles. Je suis très ouverte sur le fait qu’il y a beaucoup d’outils différents qui peuvent aider en fonction des élèves auxquels on est confronté. Nous sommes tous différents, et il a des choses qui vont plus parler à certains et pas à d’autres.

Je veux rester dans une logique d’ouverture sur la pédagogie, pour parler au plus grand nombre.

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