De Pneuma à Coïncidence des opposés…
Chaque année le Cerfav accueille un artiste en résidence, afin de faire découvrir les possibilités qu’offre le verre, et créer de l’émulation artistique entre les différents élèves et un acteur extérieur au Cerfav. L’année dernière c’est le peintre et graffeur AlexOne qui est venu mêler le verre à son univers créatif, avant d’investir une partie du musée des Beaux arts de Nancy.
En cette année du verre 2022, ce sont les valises d’Antoine Brodin, souffleur de verre ardéchois, qui viennent se poser au Cerfav. Ancien élève et responsable de l’atelier galerie, son retour se fait cette fois en artiste accompli.
Suite à une première interview avec Antoine Brodin, il est maintenant temps de nous retrouver pour clôturer ce projet de résidence.
Venu avec un concept bien précis en tête;
“Un souffle qui pousse la pierre, comme venant des entrailles de la terre, comme des racines craquant le béton de nos routes: une force lente mais inexorable.”
Antoine Brodin a vu son projet évoluer, se redessiner, lui échapper parfois.
Seul dans son laboratoire , et donc limité par la place et le manque de moyen humain, cette résidence au Cerfav lui permet de réaliser son projet à échelle humaine.
Pour son projet, Antoine Brodin a choisi d’associer plusieurs éléments. Des miroirs noirs, servant de socle, amènent de la profondeur à l’ensemble de l’installation. Une fois installées sur ce miroir sombre, les pièces semblent sortir du sol. Ensuite les bulles de verre, soufflées directement sous les rochers et épousant leurs formes. Et enfin ces énormes pierres de Volvic, volcaniques, choisies avec soin dans la carrière, clouant au sol le verre.
Par cette association, l’artiste a voulu illustrer la rencontre, le combat entre deux matières minérales n’ayant pas la même forme, le verre visqueux, changeant, qui finit par se figer et tenir bon face à l’impassibilité, la densité des pierres. Pour lui c’est l’image de la lave venant faire craquer la croûte terrestre.
Une équipe mobilisée autour de l’artiste
Pendant cette résidence, Antoine Brodin a été en contact avec de nombreuses personnes, très différentes les unes des autres. Chez les verrier·es: Jean-Pierre Mateus, souffleur formateur, les élèves et apprenti·es. Anthony Vallée et Gwendal Bracque, techniciens du Cerfav, n’ont également pas hésité à mettre en place des systèmes farfelus pour répondre aux contraintes techniques nécessaires à la réalisation du projet. Il s’est aussi rapproché du lycée Camille Claudel à Remiremont pour mieux connaître les possibilités qu’offrent les différentes roches, et choisir la plus adéquate avec son projet. S’en est suivi une découverte de la carrière Mallet, et la sélection des pierres.
Rencontre avec les élèves de Colombey-les-belles
L’artiste a également été au contact d’élèves du collège de Colombey les belles, pour parler de son métier, et leur faire une démonstration de soufflage. Il leur a demandé d’imaginer des créatures marines encore inconnues (clin d’œil à Jules Vernes, une de ses inspirations) puis a réalisé l’une d’elles sous leurs yeux, au Cerfav. Ainsi naquit en septembre le Crabenquin.
Des croquis à l’installation finale.
Au fil des croquis, des tests, des discussions « Coïncidences des opposés”, ( initialement “Pneuma”) est née puis est venue prendre place au musée des Beaux Arts de Nancy, sous le tableau “Les Voluptueux” de Victor Prouvé. L’installation s’est faite avec quelques sueurs froides, au vu des pièces fragiles, des arrangement afin de respecter les règles muséales (distance de précaution avec le tableau, accessibilités pour les PMR, etc…) et beaucoup d’efforts d’Antoine Brodin et Anthony Vallée pour déplacer les roches. Ironie du sort, c’est évidemment une petite pièce qui a cassé, alors que les installations plus lourdes et suscitant plus de stress ont pris place sans encombres.
Au final, le visiteur découvre une installation dans laquelle il peut déambuler, prendre le temps d’observer la rencontre entre les différents éléments et ressentir la sensation de force tranquille souterraine, qui, petit à petit, se fraie un passage jusqu’à la surface
Une conclusion?
Quelques mots d’Antoine Brodin:
“Je pensais sortir indemne de cette résidence. J’avais l’idée en tête, il ne s’agissait plus que de tout simplement la réaliser en grand. Tout simplement ? Loin de là…
Je pense ne pas me tromper en disant que je suis passé de la simple représentation d’une idée: pneuma, le souffle vital soulevant le monde à un concept plus large dont le titre « Coïncidence des opposés » trouve pour le moment tout son sens. J’ai tout juste soulevé une partie du rideau dans ce travail et les perspectives entrevues me galvanisent.”
A suivre donc!
Retrouver également la deuxième interview d’Antoine Brodin, réalisée à la fin de sa résidence.
Article écrit par Zoé Métivier, assistante communication du Cerfav